Bonjour à tous
Merci à Michel pour ses félicitations pour Antoine
Bravo également à tous les coureurs Taill' pour les dernières perfs.
2 infos : le site de la 6666 Occitane est actif. Vous pouvez y aller :
www.6666occitane.fr.D'autre part, je vous joins son récit de l'UTMB.
Bonne lecture et à bientôt.
Anne
Un UTMB mental.
Pour la 5ème fois consécutive, je me suis préparé pour ce grand rendez-vous de l’ultra. L’objectif cette année est de grignoter des minutes, et de rentrer dans les 10 premiers, ce que je n’ai réussi qu’à 2 reprises.
Météo capricieuse ces derniers jours, plutôt correcte ce vendredi du départ, j’opte pour un tee-shirt à manches longues et un cuissard couvrant les genoux. Tandis que le ciel se charge finalement de nuages gris nous masquant le Mont-Blanc, l’ambiance chauffe sur la ligne de départ. Je retrouve les habitués de l’UTMB, une formidable brochette internationale du plus haut niveau. Cet événement est incroyable !
La pesée du sac nous distrait cinq minutes, le mien est à 2,000 kg tout rond. Ça fait rire l’assemblée. J’avoue que je ne l’ai pas fait exprès.
Cette nouvelle condition de porter 2 kg dont 1 litre d’eau me conduit à transporter ce liquide dans 2 bouteilles de 0,5 l plutôt que dans une poche à eau, ce que je trouve moins confortable, mais bon, je me suis bien entraîné avec et ça ne va pas mal.
Les dernières secondes sont égrainées par le public, et c’est le départ tant attendu. Me voilà parti pour un tour de cadran, un tour de Mont-Blanc, un tour que j’ai parfaitement en tête, mais le plaisir est toujours aussi fort.
Je ne vois pas Kilian passer rapidement sur ma gauche et prendre la tête de course. Je suis tranquille, profitant pleinement du moment. Je suis un poil plus rapide que d’habitude et c’est voulu.
Dans l’ascension vers la Charme, c’est limite s’il ne pleut pas. J’ai bien transpiré, je passe en 1h27 au pointage, soit 1 minute de moins qu’en 2008, soit le bénéfice du poil.
Le tee-shirt me colle au ventre dans la descente et me donne froid. Ce n’est pas agréable, aussi je le tire de temps en temps. J’aurais dû prendre une épaisseur de plus. C’est trop tard, et il me faudra composer avec jusqu’aux Contamines.
Bizarrement j’arrive à Saint-Gervais un peu plus tard que prévu, pourtant les sensations sont au top, j’étais avec Marco Olmo, et bien mieux placé que l’an dernier. Cela semble donc général. Peut-être le temps.
Ravitaillement express, je pars dans la forêt, suivant le parcours bosselé le long de la rivière. Finalement je me rends compte que les bouteilles changent mon centre de gravité, ce qui me gêne un peu sur le haut des cuisses. Je comprends de suite que cette édition ne sera pas évidente pour moi.
Pour l’heure, j’arrive aux Contamines où je retrouve Anne pour un ravitaillement posé, tandis que c’est l’effervescence tout autour. J’enfile un tee-shirt Odlo pour la nuit et un manches longues, et je repars vers la Balme. La partie roulante jusqu’à Notre-Dame de la Gorge me montre bien que j’ai du mal à envoyer. Ce n’est pas grave, il reste beaucoup de temps, et je suis assez bien placé, 37 – 38 environ. Je monte bien, d’un rythme régulier, dans la brume qui s’épaissit nettement après la Balme.
Mes collègues de Lafuma sont quasiment tous devant, dont Julien CHORIER dans les tous premiers. J’ai aperçu Guillaume MILLET aux Contamines et je me demande si je le reverrai ou pas.
Descente sur les Chapieux, les bonnes sensations semblent revenir. J’aime beaucoup ce secteur tortueux. Je double quelques coureurs. La nuit est vraiment noire. Cette année, je trouve qu’il y a plus de monde à cet endroit. Beaucoup ont fait la route pour aider leur concurrent. C’est sympa cette ambiance inattendue. Je me ravitaille bien, prends une soupe, puis deux, et je quitte les lieux bien réchauffé.
Je cours l’intégralité de la route jusqu’à la Ville des Glaciers, puis une partie de la piste vers la Seigne. Je suis content de cette portion. Je crois que la soupe m’est bénéfique, autant par sa chaleur que pour l’énergie que j’en tire.
Le sentier technique se trouve dans la brume épaisse. C’est fort embêtant car je n’aperçois aucune rubalise. Par chance ou par habitude, je suis le bon tracé et tombe sur les rubalises jusqu’au sommet, ce qui n’est pas le cas de la tête de course, où plusieurs s’égarent 20 minutes.
La bascule vers le lac Combal est délicate. Je descends doucement car je n’y vois pas grand-chose. Je mets la frontale en mode éco car en phare, on n’y voit que dalle.
Je retrouve Topher GAYLORD au ravito du lac, arrêté depuis 10 minutes, mal foutu au niveau digestif. J’avale 2 soupes et repars, plutôt bien. J’ai environ 40 minutes de retard sur mes prévisions, mais j’ai déjà un autre objectif, celui de finir, et pourquoi pas dans les 10, toujours.
La montée de l’arête Mont Favre est dégagée. Je grimpe bien, mais il me faut prendre un gel pour relancer un peu. Il ne passe pas terrible. Je continue avec des fruits secs, mais là encore, j’ai l’impression que ça s’accumule inutilement. Pas génial tout ça. Je bois peu également, car je sens que je ne digère plus rien. Mince, je dois attendre de descendre pour faire baisser les pulsations et digérer.
Il fait froid, mais je suis plutôt bien. Je pointe à l’arête, les bénévoles sont sous les tentes. Bigre ! Ce n’est pas la joie pour eux !
Enfin, la descente, et quelle descente cette année ! Je me régale sur ce nouveau tracé, plus technique que lors des éditions précédentes. Je sens que je retrouve des forces à mesure que l’estomac refonctionne. Je rattrape quelques concurrents et arrive à Courmayeur 29ème. C’est jouable …
Je ne traîne pas, avale la soupe qu’Anne m’a préparée. Je m’enquiers de la position des copains, Julien 2nd ! , Hervé dans les 10, Jérôme 13ème, Guillaume 17ème. C’est réconfortant. Je file dans Courmayeur, me demandant encore une fois comment font les nouveaux UTMBistes pour s’y retrouver entre l’absence de balisage et la présence du marquage de la CCC ! D’ailleurs Pascal PARNY en fera la triste expérience en suivant ce parcours. C’est dommage de retrouver ce souci chaque année !
Peu avant le sentier de Bertone, je rebrousse chemin car depuis 500 m, je ne vois plus aucune marque. Par crainte d’un nouvel itinéraire, on ne sait jamais, je préfère rechercher la dernière rubalise. Je la retrouve, et non, pas d’erreur, c’était le bon chemin. J’en suis quitte pour 1 km de plus. Effectivement un virage plus loin, j’aurais vu la rubalise rescapée.
Je vois Samuel BONAUDO qui roupille sur le bord du sentier. J’hésite à le réveiller, car sans couverture sur lui, il risque un refroidissement. Le gars qui me suit s’en charge, ça ne lui plaît pas non plus.
De nouveau je faiblis, de nouveau je mange un peu, et de nouveau ça ne passe pas bien. Je bois le mélange d’eau et de coca qui normalement me réussit, mais sans plus de résultat.
J’ai l’impression de me traîner. J’arrive à Bertone, ingurgite de la soupe et repars tandis que le jour se lève. Se sentir en balcon me plaît. J’ai de l’énergie, à croire qu’il me faudrait de la soupe toutes les demi-heures !
Je rattrape des coureurs, dont Jérôme CHALLIER qui ne va pas fort, et me fait rejoindre par Elizabeth HAWKER au coude à coude avec Kristin MOEHL !! Je n’en reviens pas !
Elizabeth me double, trottinant tout ce qui monte, et je me retrouve entre les deux, qui se livrent à un duel de haut niveau. Kristin semble plus raisonnable. Elles passent Bonatti comme une formalité, alors que je m’y arrête pour me ravitailler.
Je rejoins l’équipée féminine et arrive peu avant elle à Arnuva, en 20ème position, mais loin du 10ème.
La vue du Grand Col Ferret n’est pas réjouissante. Masqué par une accumulation de nuages foncés, il promet !
A peine sorti du ravito, j’enfile ma veste coupe-vent. Ça souffle fort, il bruine et ça caille. Je ne peux pas suivre Elizabeth, car elle court dans des pourcentages qui sont trop durs pour moi à ce stade de la course. C’est suicidaire il me semble.
Quelle ascension ! De nouveau je n’y vois plus rien, mais là il n’y a pas grand risque de se perdre. D’ailleurs en trottinant, je me retrouve nez à nez avec la tente de pointage au sommet ! Je n’ai pas vu passer cette montée.
La descente qui suit est la bienvenue. Je remarque que mes traces de pas s’ourlent de glace. Il est temps de retrouver la chaleur de la vallée !
Je descends bien, mais pas comme d’habitude. Je ne suis simplement pas performant. Ça fait trop longtemps que je n’ai pas mangé ni bu efficacement. Revigoré par des températures meilleures, je me refais une petite santé, tout en réfléchissant à une stratégie me permettant de récupérer ma forme. J’imagine que si j’en suis là, c’est probablement à cause du coup de froid du départ.
A la Fouly, je marque une pause de 10 minutes pendant laquelle je mange vraiment, des pâtes, du riz, du jambon, une compote, du bouillon. Ça fait un bien fou. C’est décidé, je m’arrête à chaque ravito pour un repas, tant pis pour le temps et la place, au moins je bouclerai le tour, et qui sait, l’ultra réserve parfois des surprises.
Le moral au top, sûr de moi, je quitte les lieux, tandis que Guillaume se repose encore. Je me dis qu’il me rattrapera, et que si on pouvait faire un bon bout ensemble, ce serait super.
Je pars pour de bon, retrouve mes enfants et mes parents à Issert où ils se placent chaque année. Je dois leur donner bonne figure à ce moment car je vais très bien.
Dans la montée pour Champex, je me désaltère à une fontaine, car le soleil cogne à présent. Il me faut à nouveau manger un peu et, chose surprenante, ça ne passe pas mieux. C’est pénible à la fin …
J’arrive à Champex, où, même scénario, je me restaure. Ça vire au tour gastronomique cet ultra ! J’ai quand même gagné quelques places, maintenant autour de la 17ème. C’est sans doute raté pour être dans les 10, mais la satisfaction d’arriver au bout domine le reste, et j’ai promis à mes enfants un final ensemble.
La section qui suit n’est pas des plus simples, avec Bovine à grimper. Je longe le beau lac et retrouve Elizabeth HAWKER. Une grosse ampoule la gêne depuis un moment. Kristin est loin devant.
Pas de chance, quand je rattrape un coureur, un autre me double. Bovine passe bien. Je m’emberlificote avec les bâtons, me promettant de ne pas m’en encombrer en 2010, et amorce la descente sur Trient. Au col de la Forclaz, je suis accueilli chaleureusement par les représentants de LAFUMA. Ca fait chaud au cœur, et je garde une bonne allure jusqu’au ravitaillement.
J’en ressors en forme pour m’attaquer à Catogne. Cette longue montée, l’avant dernière, n’est pas technique du tout, simplement régulière et fatigante, car les jambes tricotent depuis 20 heures.
J’estime que j’en ai pour 25h30 cette année. Mentalement, j’ai viré d’objectif depuis longtemps. C’est ce qu’il fallait opérer pour trouver les ressources nécessaires. Etre bien dans sa tête est décisif pour aller au bout.
Nouvelle descente vers Vallorcine, qui ressemble à celle de 2005. Ça me va. Ce long monotrace m’emmène quasiment au village, en évitant la piste monotone et cassante.
Mes enfants m’accompagnent sur les derniers 500 m. C’est sympa. Nous laissons un train passer juste avant le ravito, et devons attendre que les barrières se relèvent. Statistiquement, il y avait peu de chances que ça arrive !
Dernier arrêt, plein de promesses, surtout celle d’arriver à Chamonix …
Je suis 16ème, je réalise que c’est très bien, et je trottine le col des Montets, en direction de la Tête au Vent, dernière ascension.
Je double un coureur, et m’attaque à l’ultime obstacle. C’est vraiment raide, mais ça ressemble tellement à mon parcours d’entraînement que je suis assez à l’aise. Un Espagnol me passe, et le coureur que j’avais doublé peu de temps auparavant revient à son tour. Avec ce dernier nous courons ensemble jusqu’à la Flégère, en admirant les jeunes bouquetins et leur mère, sur le sentier même ! Quel beau final !
Je rejoins Scott JUREK et reste avec lui, laissant partir mon compagnon d’un moment vers la dernière descente. Nous prenons une soupe ensemble échangeant quelques mots sur cette édition difficile pour nous, et je quitte la Flégère, m’élançant vers Chamonix.
Quelle sensation de bonheur de se savoir près d’arriver, d’avoir accompli un tour complet malgré les aléas.
Tout à mes pensées positives, je me prends une superbe gamelle, joli vol qui me laisse le temps de comprendre ce qui m’arrive, et où je vais entrer en contact avec le sol. Paf ! Ça fait assez mal, surtout au ventre qui a tout pris. Tant pis pour lui, après tout ce qu’il m’a fait subir pendant 25 h celui-là ! Les jambes sont sauves, et je repars, moins vaillamment, mais entier.
Chamonix, enfin, les enfants sont là qui m’attendent depuis un bon moment, et nous finissons ensemble, heureux, au travers d’une foule qui nous acclame, quatre heures après Kilian !
Me voilà finisher, pour la 4ème fois, 4ème, 11ème, 6ème et 16ème et déjà tourné vers 2010 avec des idées en tête pour être plus performant.